Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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La Genèse.

(Langue portugaise)

LES PRÉDICTIONS SELON LE SPIRITISME.

Chapitre XVIII.


LES TEMPS SONT ARRIVÉS.

Signes des temps. (1-26.) — La génération nouvelle. (27-35.)


SIGNES DES TEMPS.


1. — Les temps marqués par Dieu sont arrivés,  ( † ) nous dit-on de toutes parts, où de grands événements vont s’accomplir pour la régénération de l’humanité. 2 Dans quel sens faut-il entendre ces paroles prophétiques ? Pour les incrédules, elles n’ont aucune importance ; à leurs yeux, ce n’est que l’expression d’une croyance puérile sans fondement ; 3 pour le plus grand nombre des croyants, elles ont quelque chose de mystique et de surnaturel qui leur semble être l’avant-coureur du bouleversement des lois de la nature. 4 Ces deux interprétations sont également erronées : la première, en ce qu’elle implique la négation de la Providence ; la seconde, en ce que ces paroles n’annoncent pas la perturbation des lois de la nature, mais leur accomplissement.


2. — Tout est harmonie dans la création ; 2 tout révèle une prévoyance qui ne se dément ni dans les plus petites choses ni dans les plus grandes ; 3 nous devons donc d’abord écarter toute idée de caprice inconciliable avec la sagesse divine ; 4 en second lieu, si notre époque est marquée pour l’accomplissement de certaines choses, c’est qu’elles ont leur raison d’être dans la marche de l’ensemble.

5 Ceci posé, nous dirons que notre globe, comme tout ce qui existe, est soumis à la loi du progrès. 6 Il progresse physiquement par la transformation des éléments qui le composent, et moralement par l’épuration des Esprits incarnés et désincarnés qui le peuplent. 7 Ces deux progrès se suivent et marchent parallèlement, car la perfection de l’habitation est en rapport avec celle de l’habitant. 8 Physiquement, le globe a subi des transformations, constatées par la science, et qui l’ont successivement rendu habitable par des êtres de plus en plus perfectionnés ; 9 moralement, l’humanité progresse par le développement de l’intelligence, du sens moral et l’adoucissement des mœurs. 10 En même temps que l’amélioration du globe s’opère sous l’empire des forces matérielles, les hommes y concourent, par les efforts de leur intelligence ; ils assainissent les contrées insalubres, rendent les communications plus faciles et la terre plus productive.

11 Ce double progrès s’accomplit de deux manières : l’une lente, graduelle et insensible ; l’autre par des changements plus brusques, à chacun desquels s’opère un mouvement ascensionnel plus rapide qui marque, par des caractères tranchés, les périodes progressives de l’humanité. 12 Ces mouvements, subordonnés dans les détails au libre arbitre des hommes, sont en quelque sorte fatals dans leur ensemble, parce qu’ils sont soumis à des lois, comme ceux qui s’opèrent dans la germination, la croissance et la maturité des plantes ; 13 c’est pourquoi le mouvement progressif est quelquefois partiel, c’est-à-dire borné à une race ou à une nation, d’autres fois général.

14 Le progrès de l’humanité s’effectue donc en vertu d’une loi ; or, comme toutes les lois de la nature sont l’œuvre éternelle de la sagesse et de la prescience divines, tout ce qui est l’effet de ces lois est le résultat de la volonté de Dieu, non d’une volonté accidentelle et capricieuse, mais d’une volonté immuable. 15 Lors donc que l’humanité est mûre pour franchir un degré, on peut dire que les temps marqués par Dieu sont arrivés, comme on peut dire aussi qu’en telle saison, ils sont arrivés pour la maturité des fruits et la récolte.


3. — De ce que le mouvement progressif de l’humanité est inévitable, parce qu’il est dans la nature, il ne s’ensuit pas que Dieu y soit indifférent, et qu’après avoir établi des lois, il soit rentré dans l’inaction, laissant les choses aller toutes seules. 2 Ses lois sont éternelles et immuables, sans doute, mais parce que sa volonté elle-même est éternelle et constante, et que sa pensée anime toutes choses sans interruption ; 3 sa pensée, qui pénètre tout, est la force intelligente et permanente qui maintient tout dans l’harmonie ; 4 que cette pensée cesse un seul instant d’agir, et l’univers serait comme une horloge sans balancier régulateur. 5 Dieu veille donc incessamment à l’exécution de ses lois, et les Esprits qui peuplent l’espace sont ses ministres chargés des détails, selon les attributions afférentes à leur degré d’avancement.


4. — L’univers est à la fois un mécanisme incommensurable conduit par un nombre non moins incommensurable d’intelligences, un immense gouvernement où chaque être intelligent a sa part d’action sous l’œil du souverain Maître, dont la volonté unique maintient partout l’unité. 2 Sous l’empire de cette vaste puissance régulatrice tout se meut, tout fonctionne dans un ordre parfait ; ce qui nous semble des perturbations sont les mouvements partiels et isolés, qui ne nous paraissent irréguliers que parce que notre vue est circonscrite. 3 Si nous pouvions en embrasser l’ensemble, nous verrions que ces irrégularités ne sont qu’apparentes et qu’elles s’harmonisent dans le tout.


5. — L’humanité a accompli jusqu’à ce jour d’incontestables progrès ; les hommes, par leur intelligence, sont arrivés à des résultats qu’ils n’avaient jamais atteints sous le rapport des sciences, des arts et du bien-être matériel ; 2 il leur reste encore un immense progrès à réaliser : c’est de faire régner entre eux la charité, la fraternité et la solidarité, pour assurer le bien-être moral. 3 Ils ne le pouvaient ni avec leurs croyances, ni avec leurs institutions surannées, restes d’un autre âge, bonnes à une certaine époque, suffisantes pour un état transitoire, mais qui, ayant donné ce qu’elles comportaient, seraient un point d’arrêt aujourd’hui. 4 Ce n’est plus seulement le développement de l’intelligence qu’il faut aux hommes, c’est l’élévation du sentiment, et pour cela il faut détruire tout ce qui pouvait surexciter en eux l’égoïsme et l’orgueil.

5 Telle est la période où ils vont entrer désormais, et qui marquera une des phases principales de l’humanité. 6 Cette phase qui s’élabore en ce moment est le complément nécessaire de l’état précédent, comme l’âge viril est le complément de la jeunesse ; 7 elle pouvait donc être prévue et prédite d’avance, et c’est pour cela qu’on dit que les temps marqués par Dieu sont arrivés.


6. — En ce temps-ci, il ne s’agit pas d’un changement partiel, d’une rénovation bornée à une contrée, à un peuple, à une race ; c’est un mouvement universel qui s’opère dans le sens du progrès moral. 2 Un nouvel ordre de choses tend à s’établir, et les hommes qui y sont le plus opposés y travaillent à leur insu ; 3 la génération future, débarrassée des scories du vieux monde et formée d’éléments plus épurés, se trouvera animée d’idées et de sentiments tout autres que la génération présente qui s’en va à pas de géant. 4 Le vieux monde sera mort, et vivra dans l’histoire, comme aujourd’hui les temps du moyen âge avec leurs coutumes barbares et leurs croyances superstitieuses.

5 Du reste, chacun sait combien l’ordre de choses actuel laisse encore à désirer ; 6 après avoir, en quelque sorte, épuisé le bien-être matériel qui est le produit de l’intelligence, on arrive à comprendre que le complément de ce bien-être ne peut être que dans le développement moral. 7 Plus en avance, plus on sent ce qui manque, sans cependant pouvoir encore le définir clairement : c’est l’effet du travail intime qui s’opère pour la régénération ; on a des désirs, des aspirations qui sont comme le pressentiment d’un état meilleur.


7. — Mais un changement aussi radical que celui qui s’élabore ne peut s’accomplir sans commotion ; il y a lutte inévitable entre les idées. 2 De ce conflit naîtront forcément des perturbations temporaires, jusqu’à ce que le terrain soit déblayé et l’équilibre rétabli. 3 C’est donc de la lutte des idées que surgiront, les graves événements annoncés, et non de cataclysmes, ou catastrophes purement matérielles. 4 Les cataclysmes généraux étaient la conséquence de l’état de formation de la terre ; aujourd’hui ce ne sont plus les entrailles du globe qui s’agitent, ce sont celles de l’humanité.


8. — Si la terre n’a plus à redouter les cataclysmes généraux, elle n’en est pas moins soumise à des révolutions périodiques dont les causes sont expliquées, au point de vue scientifique, dans les instructions suivantes données par deux éminents Esprits : n

2 « Chaque corps céleste, outre les lois simples qui président à la division des jours et des nuits, des saisons, etc., subit des révolutions qui demandent des milliers de siècles pour leur parfait accomplissement, mais qui, comme les révolutions plus brèves, passent par toutes les périodes, depuis la naissance jusqu’à un summum d’effet, après lequel il y a décroissance jusqu’à la dernière limite, pour recommencer ensuite à parcourir les mêmes phases.

3 « L’homme n’embrasse que les phases d’une durée relativement courte, et dont il peut constater la périodicité ; mais il en est qui comprennent de longues générations d’êtres, et même des successions de races, dont les effets, par conséquent, ont pour lui les apparences de la nouveauté et de la spontanéité, tandis que, si son regard pouvait se porter à quelques milliers de siècles en arrière, il verrait, entre ces mêmes effets et leurs causes, une corrélation qu’il ne soupçonne même pas. Ces périodes, qui confondent l’imagination des humains par leur longueur relative, ne sont cependant que des instants dans la durée éternelle.

4 « Dans un même système planétaire, tous les corps qui en dépendent réagissent les uns sur les autres ; toutes les influences physiques y sont solidaires, et il n’est pas un seul des effets que vous désignez sous le nom de grandes perturbations qui ne soit la conséquence de la composante des influences de tout ce système.

5 « Je vais plus loin : je dis que les systèmes planétaires réagissent les uns sur les autres, en raison du rapprochement ou de l’éloignement qui résulte de leur mouvement de translation à travers les myriades de systèmes qui composent notre nébuleuse. 6 Je vais plus loin encore : je dis que notre nébuleuse, qui est comme un archipel dans l’immensité, ayant aussi son mouvement de translation à travers les myriades de nébuleuses, subit l’influence de celles dont elle se rapproche.

7 « Ainsi les nébuleuses réagissent sur les nébuleuses, les systèmes réagissent sur les systèmes, comme les planètes réagissent sur les planètes, comme les éléments de chaque planète réagissent les uns sur les autres, et ainsi de proche en proche jusqu’à l’atome ; de là, dans chaque monde, des révolutions locales ou générales, qui ne semblent des perturbations que parce que la brièveté de la vie ne permet d’en avoir que les effets partiels.

8 « La matière organique ne saurait échapper à ces influences ; les perturbations qu’elle subit peuvent donc altérer l’état physique des êtres vivants, et déterminer quelques-unes de ces maladies qui sévissent d’une manière générale sur les plantes, les animaux et les hommes ; ces maladies, comme tous les fléaux, sont pour l’intelligence humaine un stimulant qui la pousse, par la nécessité, à la recherche des moyens de les combattre, et à la découverte des lois de la nature.

9 « Mais la matière organique réagit à son tour sur l’Esprit ; celui-ci, par son contact et sa liaison intime avec les éléments matériels, subit aussi des influences qui modifient ses disposions, sans cependant lui ôter son libre arbitre, surexcitent ou ralentissent son activité, et, par cela même, contribuent à son développement. 10 L’effervescence, qui se manifeste parfois dans toute une population, parmi les hommes d’une même race, n’est pas une chose fortuite, ni le résultat d’un caprice ; elle a sa cause dans les lois de la nature. 11 Cette effervescence, d’abord inconsciente, qui n’est qu’un vague désir, une aspiration non définie vers quelque chose de mieux, un besoin de changement, se traduit par une sourde agitation, puis par des actes qui amènent les révolutions sociales, lesquelles, croyez-le bien, ont aussi leur périodicité, comme les révolutions physiques, car tout s’enchaîne. 12 Si la vue spirituelle n’était pas circonscrite par le voile matériel, vous verriez ces courants fluidiques qui, comme des milliers de fils conducteurs, relient les choses du monde spirituel et du monde matériel.

13 « Quand on vous dit que l’humanité est arrivée à une période de transformation, et que la terre doit s’élever dans la hiérarchie des mondes, ne voyez dans ces paroles rien de mystique, mais, au contraire, l’accomplissement d’une des grandes lois fatales de l’univers, contre lesquelles tout mauvais vouloir humain se brise. »

ARAGO.   


9. —  Oui, certes, l’humanité se transforme comme elle s’est déjà transformée à d’autres époques, 2 et chaque transformation est marquée par une crise qui est, pour le genre humain, ce que sont les crises de croissance pour les individus ; 3 crises souvent pénibles, douloureuses, qui emportent avec elles les générations et les institutions, mais toujours suivies d’une phase de progrès matériel et moral.

4 « L’humanité terrestre, arrivée à l’une de ces périodes de croissance, est en plein, depuis bientôt un siècle, dans le travail de la transformation ; c’est pourquoi elle s’agite de toutes parts, en proie à une sorte de fièvre et comme mue par une force invisible, 5 jusqu’à ce qu’elle ait repris son assiette sur de nouvelles bases. 6 Qui la verra alors la trouvera bien changée dans ses mœurs, son caractère, ses lois, ses croyances, en un mot, dans tout son état social.

7 « Une chose qui vous paraîtra étrange, mais qui n’en est pas moins une rigoureuse vérité, c’est que le monde des Esprits qui vous environne subit le contrecoup de toutes les commotions qui agitent le monde des incarnés : je dis même qu’il y prend une part active. 8 Cela n’a rien de surprenant pour quiconque sait que les Esprits ne font qu’un avec l’humanité ; qu’ils en sortent et doivent y rentrer ; il est donc naturel qu’ils s’intéressent aux mouvements qui s’opèrent parmi les hommes. 9 Soyez donc certains que, lorsqu’une révolution sociale s’accomplit sur la terre, elle remue également le monde invisible ; toutes les passions bonnes et mauvaises y sont surexcitées comme chez vous ; 10 une indicible effervescence règne parmi les Esprits qui font encore partie de votre monde et qui attendent le moment d’y rentrer.

11 « A l’agitation des incarnés et des désincarnés se joignent parfois, le plus souvent même, parce que tout se tient dans la nature, les perturbations des éléments physiques ; 12 c’est alors, pour un temps, une véritable confusion générale, mais qui passe comme un ouragan, après lequel le ciel redevient serein, et l’humanité, reconstituée sur de nouvelles bases, imbue de nouvelles idées, parcourt une nouvelle étape de progrès.

13 « C’est dans la période qui s’ouvre qu’on verra fleurir le Spiritisme, et qu’il portera ses fruits. 14 C’est donc pour l’avenir, plus que pour le présent, que vous travaillez ; mais il était nécessaire que ces travaux fussent élaborés d’avance, parce qu’ils préparent les voies de la régénération par l’unification et la rationalité des croyances. 15 Heureux ceux qui en profitent dès aujourd’hui, ce sera pour eux autant de gagné et de peines épargnées. »

Docteur BARRY.   


10. — Il résulte de ce qui précède que, par suite de leur mouvement de translation à travers l’espace, les corps célestes exercent, les uns sur les autres, une influence plus ou moins grande, suivant leur rapprochement et leur position respective ; 2 que cette influence peut amener une perturbation momentanée dans leurs éléments constitutifs, et modifier les conditions de vitalité de leurs habitants ; 3 que la régularité des mouvements doit amener le retour périodique des mêmes causes et des mêmes effets ; 4 que si la durée de certaines périodes est assez courte pour être appréciable par les hommes, d’autres voient passer des générations et des races qui ne s’en aperçoivent pas, et pour lesquelles l’état des choses est un état normal ; 5 les générations, au contraire, contemporaines de la transition en subissent le contrecoup, et tout leur paraît s’écarter des lois ordinaires. 6 Elles voient une cause surnaturelle, merveilleuse, miraculeuse, dans ce qui n’est, en réalité, que l’accomplissement des lois de la nature.

7 Si, par l’enchaînement et la solidarité des causes et des effets, les périodes de rénovations morales de l’humanité coïncident, comme tout porte à le croire, avec les révolutions physiques du globe, elles peuvent être accompagnées ou précédées de phénomènes naturels, insolites pour ceux qui n’y sont pas habitués, de météores qui semblent étranges, d’une recrudescence et d’une intensité inaccoutumée des fléaux destructeurs. 8 Ces fléaux ne sont ni une cause, ni des présages surnaturels, mais une conséquence du mouvement général qui s’opère dans le monde physique et dans le monde moral.

9 En prédisant l’ère de rénovation qui devait s’ouvrir pour l’humanité et marquer la fin du vieux monde, Jésus a donc pu dire qu’elle serait signalée par des phénomènes extraordinaires, des tremblements de terre, des fléaux divers, des signes dans le ciel qui ne sont autres que des météores, sans sortir des lois naturelles ; mais le vulgaire ignorant a vu dans ces paroles l’annonce de faits miraculeux. n


11. — La prévision des mouvements progressifs de l’humanité n’a rien de surprenant chez des êtres dématérialisés qui voient le but où tendent toutes choses, dont quelques-uns possèdent la pensée directe de Dieu, 2 et qui jugent, aux mouvements partiels, le temps auquel pourra s’accomplir un mouvement général, 3 comme on juge d’avance le temps qu’il faut à un arbre pour porter des fruits, 4 comme les astronomes calculent l’époque d’un phénomène astronomique par le temps qu’il faut à un astre pour accomplir sa révolution.


12. — L’humanité est un être collectif en qui s’opèrent les mêmes révolutions morales que dans chaque être individuel, avec cette différence que les unes s’accomplissent d’année en année, et les autres de siècle en siècle. 2 Qu’on la suive dans ses évolutions à travers les temps, et l’on verra la vie des diverses races marquée par des périodes qui donnent à chaque époque une physionomie particulière.


13. — La marche progressive de l’humanité s’opère de deux manières, comme nous l’avons dit :  ( † ) l’une graduelle, lente, insensible, si l’on considère les époques rapprochées, qui se traduit par des améliorations successives dans les mœurs, les lois, les usages, et ne s’aperçoit qu’à la longue, comme les changements que les courants d’eau apportent à la surface du globe ; 2 l’autre, par des mouvements relativement brusques, rapides, semblables à ceux d’un torrent rompant ses digues, qui lui font franchir en quelques années l’espace qu’elle eût mis des siècles à parcourir. 3 C’est alors un cataclysme moral qui engloutit en quelques instants les institutions du passé, et auquel succède un nouvel ordre de choses qui s’assied peu à peu, à mesure que le calme se rétablit et devient définitif.

4 A celui qui vit assez longtemps pour embrasser les deux versants de la nouvelle phase, il semble qu’un monde nouveau soit sorti des ruines de l’ancien ; 5 le caractère, les mœurs, les usages, tout est changé ; c’est qu’en effet des hommes nouveaux, ou mieux régénérés, ont surgi ; 6 les idées emportées par la génération qui s’éteint ont fait place à des idées nouvelles dans la génération qui s’élève.


14. — L’humanité, devenue adulte, a de nouveaux besoins, des aspirations plus larges, plus élevées ; elle comprend le vide des idées dont elle a été bercée, l’insuffisance de ses institutions pour son bonheur ; elle ne trouve plus dans l’état des choses les satisfactions légitimes auxquelles elle se sent appelée ; c’est pourquoi elle secoue ses langes, et s’élance, poussée par une force irrésistible, vers des rivages inconnus, à la découverte, de nouveaux horizons moins bornés.

2 C’est à l’une de ces périodes de transformation, ou, si l’on veut, de croissance morale, qu’est parvenue l’humanité. 3 De l’adolescence elle passe à l’âge viril ; le passé ne peut plus suffire à ses nouvelles aspirations, à ses nouveaux besoins ; elle ne peut plus être conduite par les mêmes moyens ; elle ne se paye plus d’illusions et de prestiges : il faut à sa raison mûrie des aliments plus substantiels. 4 Le présent est trop éphémère ; elle sent que sa destinée est plus vaste et que la vie corporelle est trop restreinte pour la renfermer tout entière ; c’est pourquoi elle plonge ses regards dans le passé et dans l’avenir afin d’y découvrir le mystère de son existence et d’y puiser une consolante sécurité.

5 Et c’est au moment où elle se trouve trop à l’étroit dans sa sphère matérielle, où la vie intellectuelle déborde, où le sentiment de la spiritualité s’épanouit, que des hommes se disant philosophes espèrent combler le vide par les doctrines du néantisme et matérialisme ! 6 Étrange aberration ! Ces mêmes hommes qui prétendent la pousser en avant s’efforcent de la circonscrire dans le cercle étroit de la matière d’où elle aspire à sortir ; ils lui ferment l’aspect de la vie infinie, et lui disent, en lui montrant la tombe : Nec plus ultrà !


15. — Quiconque a médité sur le Spiritisme et ses conséquences, et ne le circonscrit pas dans la production de quelques phénomènes, comprend qu’il ouvre à l’humanité une voie nouvelle, et lui déroule les horizons de l’infini ; 2 en l’initiant aux mystères du monde invisible, il lui montre son véritable rôle dans la création, rôle perpétuellement actif, aussi bien à l’état spirituel qu’à l’état corporel. 3 L’homme ne marche plus en aveugle : il sait d’où il vient, où il va et pourquoi il est sur la terre. 4 L’avenir se montre à lui dans sa réalité, dégagé des préjugés de l’ignorance et de la superstition ; ce n’est plus une vague espérance : c’est une vérité palpable, aussi certaine pour lui que la succession du jour et de la nuit. 5 Il sait que son être n’est pas limité à quelques instants d’une existence éphémère ; 6 que la vie spirituelle n’est point interrompue par la mort ; 7 qu’il a déjà vécu, qu’il revivra encore, et que de tout ce qu’il acquiert en perfection par le travail, rien n’est perdu ; 8 il trouve dans ses existences antérieures la raison de ce qu’il est aujourd’hui, et : de ce que l’homme se fait aujourd’hui, il peut conclure ce qu’il sera un jour.


16. — Avec la pensée que l’activité et la coopération individuelles dans l’œuvre générale de la civilisation sont limitées à la vie présente, que l’on n’a rien été et que l’on ne sera rien, que fait à l’homme le progrès ultérieur de l’humanité ? 2 Que lui importe qu’à l’avenir les peuples soient mieux gouvernés, plus heureux, plus éclairés, meilleurs les uns pour les autres ? Puisqu’il n’en doit retirer aucun fruit, ce progrès n’est-il pas perdu pour lui ? 3 Que lui sert de travailler pour ceux qui viendront après lui, s’il ne doit jamais les connaître, si ce sont des êtres nouveaux qui peu après rentreront eux-mêmes dans le néant ? 4 Sous l’empire de la négation de l’avenir individuel, tout se rapetisse forcément aux mesquines proportions du moment et de la personnalité.

5 Mais, au contraire, quelle amplitude donne à la pensée de l’homme la certitude de la perpétuité de son être spirituel ! 6 Quoi de plus rationnel, de plus grandiose, de plus digne du Créateur que cette loi d’après laquelle la vie spirituelle et la vie corporelle ne sont que deux modes d’existence qui s’alternent pour l’accomplissement du progrès ! 7 Quoi de plus juste et de plus consolant que l’idée des mêmes êtres progressant sans cesse, d’abord à travers des générations du même monde, et ensuite de monde en monde jusqu’à la perfection, sans solution de continuité ! 8 Toutes les actions ont alors un but, car, en travaillant pour tous, on travaille pour soi, et réciproquement ; de sorte que ni le progrès individuel ni le progrès général ne sont jamais stériles ; il profite aux générations et aux individualités futures, qui ne sont autres que les générations et les individualités passées, arrivées à un plus haut degré d’avancement.


17. — La fraternité doit être la pierre angulaire du nouvel ordre social ;2 mais il n’y a pas de fraternité réelle, solide et effective, si elle n’est appuyée sur une base inébranlable ; cette base, c’est la foi ; 3 non la foi en tels ou tels dogmes particuliers qui changent avec les temps et les peuples et se jettent la pierre, car en s’anathématisant ils entretiennent l’antagonisme ; 4 mais la foi dans les principes fondamentaux que tout le monde peut accepter : Dieu, l’âme, l’avenir, LE PROGRÈS INDIVIDUEL INDÉFINI, LA PERPÉTUITÉ DES RAPPORTS ENTRE LES ÊTRES. 5 Quand tous les hommes seront convaincus que Dieu est le même pour tous ; que ce Dieu, souverainement juste et bon, ne peut rien vouloir d’injuste ; que le mal vient des hommes et non de lui, ils se regarderont comme les enfants d’un même Père et se tendront la main.

6 C’est cette foi que donne le Spiritisme, et qui sera désormais le pivot sur lequel se mouvra le genre humain, quels que soient le mode d’adoration et les croyances particulières.


18. — Le progrès intellectuel accompli jusqu’à ce jour dans les plus vastes proportions est un grand pas, et marque la première phase de l’humanité, mais seul, il est impuissant à la régénérer ; 2 tant que l’homme sera dominé par l’orgueil et l’égoïsme, il utilisera son intelligence et ses connaissances au profit de ses passions et de ses intérêts personnels ; c’est pourquoi il les applique au perfectionnement des moyens de nuire à ses semblables et de les détruire.


19. — Le progrès moral seul peut assurer le bonheur des hommes sur la terre en mettant un frein aux mauvaises passions ; seul, il peut faire régner entre eux la concorde, la paix, la fraternité.

2 C’est lui qui abaissera les barrières des peuples, qui fera tomber les préjugés de caste, et taire les antagonismes de sectes, en apprenant aux hommes à se regarder comme des frères appelés à s’entraider et non à vivre aux dépens les uns des autres.

3 C’est encore le progrès moral, secondé ici par le progrès de l’intelligence, qui confondra les hommes dans une même croyance établie sur les vérités éternelles, non sujettes à discussion et par cela même acceptées par tous.

4 L’unité de croyance sera le lien le plus puissant, le plus solide fondement de la fraternité universelle, brisée de tout temps par les antagonismes religieux qui divisent les peuples et les familles, qui font voir dans les dissidents des ennemis qu’il faut fuir, combattre, exterminer, au lieu de frères qu’il faut aimer.


20. — Un tel état de choses suppose un changement radical dans le sentiment des masses, un progrès général qui ne pouvait s’accomplir qu’en sortant du cercle des idées étroites et terre à terre qui fomentent l’égoïsme. 2 A diverses époques, des hommes d’élite ont cherché à pousser l’humanité dans cette voie ; mais l’humanité, encore trop jeune, est restée sourde, et leurs enseignements ont été comme la bonne semence tombée sur la pierre.

3 Aujourd’hui, l’humanité est mûre pour porter ses regards plus haut qu’elle ne l’a fait, pour s’assimiler des idées plus larges et comprendre ce qu’elle n’avait pas compris.

4 La génération qui disparaît emportera avec elle ses préjugés et ses erreurs ; la génération qui s’élève, trempée à une source plus épurée, imbue d’idées plus saines, imprimera au monde le mouvement ascensionnel dans le sens du progrès moral, qui doit marquer la nouvelle phase de l’humanité.


21. — Cette phase se révèle déjà par des signes non équivoques, par des tentatives de réformes utiles, par des idées grandes et généreuses qui se font jour et qui commencent à trouver des échos. 2 C’est ainsi qu’on voit se fonder une foule d’institutions protectrices, civilisatrices et émancipatrices, sous l’impulsion et par l’initiative d’hommes évidemment prédestinés à l’œuvre de la régénération ; 3 que les lois pénales s’imprègnent chaque jour d’un sentiment plus humain. 4 Les préjugés de race s’affaiblissent, les peuples commencent à se regarder comme les membres d’une grande famille ; 5 par l’uniformité et la facilité des moyens de transaction, ils suppriment les barrières qui les divisaient ; de toutes les parties du monde, ils se réunissent en comices universels pour les tournois pacifiques de l’intelligence.

6 Mais il manque à ces réformes une base pour se développer, se compléter, se consolider, une prédisposition morale plus générale pour fructifier et se faire accepter des masses. 7 Ce n’en est pas moins un signe caractéristique du temps, le prélude de ce qui s’accomplira sur une plus large échelle, à mesure que le terrain deviendra plus propice.


22. — Un signe non moins caractéristique de la période où nous entrons, c’est la réaction évidente qui s’opère dans le sens des idées spiritualistes ; une répulsion instinctive se manifeste contre les idées matérialistes. 2 L’Esprit d’incrédulité qui s’était emparé des masses, ignorantes ou éclairées, et leur avait fait rejeter, avec la forme, le fond même de toute croyance, semble avoir été un sommeil au sortir duquel on éprouve le besoin de respirer un air plus vivifiant. 3 Involontairement, où le vide s’est fait on cherche quelque chose, un point d’appui, une espérance.


23. — Si l’on suppose la majorité des hommes imbus de ces sentiments, on peut aisément se figurer les modifications qu’ils apporteraient dans les relations sociales : charité, fraternité, bienveillance pour tous, tolérance pour toutes les croyances, telle sera leur devise. 2 C’est le but auquel tend évidemment l’humanité, l’objet de ses aspirations, de ses désirs, sans qu’elle se rende bien compte des moyens de les réaliser ; elle essaye, elle tâtonne, mais elle est arrêtée par des résistances actives ou la force d’inertie des préjugés, des croyances stationnaires et réfractaires au progrès. 3 Ce sont ces résistances qu’il faut vaincre, et ce sera l’œuvre de la nouvelle génération ; si l’on suit le cours actuel des choses, on reconnaîtra que tout semble prédestiné à lui frayer la route ; elle aura pour elle la double puissance du nombre et des idées, et de plus l’expérience du passé.


24. — La nouvelle génération marchera donc à la réalisation de toutes les idées humanitaires compatibles avec le degré d’avancement auquel elle sera parvenue. 2 Le Spiritisme marchant au même but, et réalisant ses vues, ils se rencontreront sur le même terrain. 3 Les hommes de progrès trouveront dans les idées spirites un puissant levier, et le Spiritisme trouvera dans les hommes nouveaux des esprits tout disposés à l’accueillir. 4 Dans cet état de choses, que pourront faire ceux qui voudraient se mettre à la traverse ?


25. — Ce n’est pas le Spiritisme qui crée la rénovation sociale, c’est la maturité de l’humanité qui fait de cette rénovation une nécessité. 2 Par sa puissance moralisatrice, par ses tendances progressives, par l’ampleur de ses vues, par la généralité des questions qu’il embrasse, le Spiritisme est, plus que toute autre doctrine, apte à seconder le mouvement régénérateur ; c’est pour cela qu’il en est contemporain. 3 Il est venu au moment où il pouvait être utile, car pour lui aussi les temps sont arrivés ; plus tôt, il eût rencontré des obstacles insurmontables ; il eût inévitablement succombé, parce que les hommes, satisfaits de ce qu’ils avaient, n’éprouvaient pas encore le besoin de ce qu’il apporte. 4 Aujourd’hui, né avec le mouvement des idées qui fermentent, il trouve le terrain préparé à le recevoir ; les esprits, las du doute et de l’incertitude, effrayés du gouffre que l’on creuse devant eux, l’accueillent comme une ancre de salut et une suprême consolation.


26. — Le nombre des retardataires est encore grand sans doute, mais que peuvent-ils contre le flot qui monte, sinon y jeter quelques pierres ? Ce flot, c’est la génération qui s’élève, tandis qu’eux disparaissent avec la génération qui s’en va chaque jour à grands pas. 2 Jusque-là, ils défendront le terrain pied à pied ; il y a donc une lutte inévitable, mais une lutte inégale, car c’est celle du passé décrépit qui tombe en lambeaux, contre l’avenir juvénile ; de la stagnation contre le progrès ; de la créature contre la volonté de Dieu, car les temps marqués par lui sont arrivés.



[1] Extrait de deux communications données à la Société de Paris, et publiées dans la Revue spirite d’octobre 1868, page 313. Elles sont le corollaire de celles de Galilée, rapportées au chapitre VI, et un complément au chapitre IX sur les révolutions du globe.


[2] La terrible épidémie qui, de 1866 à 1868, a décimé la population de l’île Maurice, a été précédée d’une pluie si extraordinaire et si abondante d’étoiles filantes, en novembre 1866, que les habitants en ont été terrifiés. C’est de ce moment que la maladie, qui sévissait depuis quelques mois d’une manière assez bénigne, est devenue un véritable fléau dévastateur. C’était bien là un signe dans le ciel, et peut-être est-ce dans ce sens qu’il faut entendre les étoiles tombant du ciel dont parle l’Évangile, comme l’un des signes des temps. (Détails sur l’épidémie de l’île Maurice, Revue spirite, juillet 1867, page 208 ; novembre 1868, page 321.)


Il y a deux images de ce chapitre dans le service Google - Recherche de livres (Première édition - 1868) et (Cinquième édition - 1872.)


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